C’est après mon opération en juin 2018, que j’ai appris le lien avec Androcur. Cet été là, quand on a commencé à en parler médiatiquement. Je suis donc votre association depuis le début.
Merci pour votre site car j’y ai trouvé beaucoup de réponses que les médecins n’ont pas su m’apporter.
Cela fait longtemps que je veux partager mon histoire, mais comme c’est une longue histoire comme pour toutes au final, je ne savais pas par où commencer. Alors voilà je vais y aller dans l’ordre.
J’ai commencé à prendre Androcur en 2007, un demi comprimé par jour, 21 jours sur 28.
Pour de l’acné au début, puis je l’ai continué car il avait également un effet contraceptif.
J’ai essayé d’autres pilules mais j’en revenais toujours à Androcur car c’était ce que je supportais le mieux.
Ma gynécologue, envers et contre tous, persistait à dire, que c’était une très bonne pilule, d’ailleurs moins dangereuse que d’autres pilules (moins de risque de développer des cancers du sein par exemple…).
J’avais à peine 20 ans quand j’ai commencé à prendre Androcur, j’étais à l’université, et c’est à cette période que mes maux de tête ont commencé.
On n’a jamais fait le lien avec Androcur. On me disait que c’était des migraines. Je me croyais “petite nature”, car en effet, si j’avais eu une semaine stressée (avec les partiels par exemple…), si j’étais trop fatiguée, si je loupais un repas… arrivé au samedi, je le passais au lit car mes maux de tête venaient avec des nausées, et je passais la journée au lit et à vomir. Incapable de faire quoique ce soit. Même un verre d’eau me faisait vomir, et donc je ne pouvais prendre aucun comprimé pour que les maux de tête passent.
Donc oui cela ressemblait à des migraines. Mais pour diagnostiquer une migraine il faut faire un scanner, un IRM non ? A moi non, on ne m’en a jamais prescrit. C’est pas faute de l’avoir mentionné au généraliste, à la gynécologue, à l’endocrinologue (car j’ai aussi subi une ablation partielle de la tyroïde en 2012) et personne ne prenait au sérieux mes maux de tête, soit disant “migraines”.
Même mon généraliste, qui c’est vrai m’a toujours dit que Androcur ne devrait pas être pris comme contraceptif, mais il n’a jamais mentionné le risque de tumeur, ni même aucun risque.
Je continuais à croire ma gynécologue, qui était très convaincante, “cela fait 30 ans que je prescrit Androcur moi et ma collègue du cabinet, c’est une très bonne pilule, pas une grossesse en 30 ans…il ne faut pas écouter les généralistes, c’est moi qu’il faut écouter.” Voila ce que j’ai entendu pendant 10 ans.
En 2014, je suis allée voir une autre gynécologue pour avoir son avis sur Androcur et mes maux de tête. Elle a confirmé que Androcur était une très bonne pilule, et qu’elle le prescrivait également depuis longtemps. Et concernant les maux de tête, qualifiés automatiquement de migraine, pouvaient être dû aux chutes d’hormones, quand je fais un arrêt de pilule, ou bien le chocolat, le vin blanc, etc. donc à moi d’adapter mon mode de vie. Puis elle me propose “d’empêcher” ces migraines en prenant Androcur en continu, c’est à dire, sans semaine d’arrêt pour éviter les maux de têtes (supposés dus au chute d’hormones lors de la semaine d’arrêt). Puis au lieu de me prescrire un demi-comprimé, elle me prescrit un comprimé par jour à prendre tous les jours pendant un an.
Un an plus tard (2015), je retourne voir ma gynécologue, je lui raconte la prescription de sa consœur, et elle est outrée de savoir qu’elle m’ a prescrit un comprimé par jour tous les jours sans arrêt pendant un an, “c’est beaucoup trop!” Et puis elle répond que “s’il y a des maux de tête il faut chercher d’où vient le problème et non pas le couvrir!” Ce qui est vrai, mais elle n’en a rien fait, elle a continué à me prescrire Androcur, un demi comprimé 21 jours sur 28.
Entre 2014 et 2018 je vivais à Londres, et j’ai consulté un généraliste là-bas, qui ne pouvait pas me prescrire Androcur car il n’était pas autorisé en Angleterre (j’ai compris plus tard pourquoi). Donc je continuais à voir ma gynécologue chaque fois que je rentrais en France pour la prescription d’Androcur car c’est la seule pilule que je supportais, et toujours pas informée des risques bien sur. Mais par contre mes maux de tête persistaient.
La dernière fois que j’ai vu ma gynécologue, c’était en avril 2018.
A partir de janvier 2018, j’ai commencé à avoir des vertiges. Au travail, assise, dans la journée, ça ne m’était jamais arrivé avant. Je pensais que cela pouvait venir de mon traitement de la thyroïde que je venais de changer. J’ai donc fait prise de sang, signalais à mon endocrinologue en France, elle me dit que non la thyroïde et TSH sont normales.
Puis dans les mois qui suivent, je ressens de plus en plus de fatigue, déprime, agacement, aucune motivation, je venais d’avoir 30 ans mais j’étais las, déprimée. J’en parlais autour de moi, à Londres, tout le monde est un peu déprimé. Alors il faut peut être que je change quelque chose à ma vie, c’est le travail, les relations, la colloc, Londres, la vie… Au travail, je suis de plus en plus désorganisée, je n’arrive pas à avancer, je suis de plus en plus en retard le matin, mais genre, 1 heure de retard.
De plus en plus d’absences car maux de tête de plus en plus fréquent, et quand mes “migraines” venaient je ne pouvais pas bouger du lit, je passais la journée à vomir, sans pouvoir prendre aucun comprimé pour que cela passe. Je devais juste rester au lit, essayer de dormir et attendre que ça passe.
Heureusement j’avais des supérieures très compréhensives, qui ont essayé de savoir ce qui se passait et voir si on pouvait faire quelque chose. Clairement je faisais une dépression, et même ma cheffe voulait m’aider.
Le 7 juin 2018, je vais voir mon généraliste à Londres pour lui parler de tout ça: il confirme c’est une dépression, il me dit même “vous savez à 30 ans vous n’êtes plus toute jeune, c’est normal d’être fatigué”. Il m’oriente alors vers une thérapie, un psy.
Une semaine plus tard, le 14 juin 2018, 5h du matin, j’ouvre les yeux et je vois des ambulanciers dans ma chambre: je venais de faire une crise d’épilepsie dans mon sommeil. C’est mon compagnon qui s’était réveillé dans la nuit et qui s’en est rendu compte. On m’emmène alors aux urgences où on me fait passer un scanner. Le verdict tombe: j’ai une masse de la taille d’une pêche (6.8cm), qui compresse contre le lobe frontal droit, mais on ne sait pas encore si c’est malin ou bénin. Il faut alors que je sois opérée.
On me transfère dans un autre hôpital pour que je sois opérée une semaine plus tard. Je ne comprends toujours pas ce qui m’arrive. Pour moi c’est une tumeur, ok donc enlevez-moi ça que je rentre chez moi. Je réalisais pas ce qui m’arrivait du tout. On m’explique plusieurs fois (car avec la crise d’épilepsie, mon cerveau n’enregistrait pas tout, j’étais assommée) que c’est une tumeur dite méningiome, qui grossit depuis des années. “Des années” !
J’étais à Londres, ils ne connaissent pas Androcur, donc ils n’ont pas fait le lien. Mais je l’ai arrêté de moi-même le lendemain de l’opération ! (sans savoir le lien avec le méningiome que l’on venait de m’enlever.)
C’est en rentrant en France 2-3 semaines plus tard que l’on s’est rendu compte que c’était Androcur. Cet été là, 2018, c’est là qu’on a commencé à en parler. A quelques mois près (en Avril 2018 quand j’ai vu ma gynéco), on en aurait entendu parlé, j’aurai peut-être pu faire le lien avec tous mes symptômes, car ils étaient là : maux de tête fréquent, vertiges, fatigue, dépression…
A peine un mois après la première opération, j’ai du être réopérée d’urgence pour cause d’infection post-opératoire: la cicatrice se désunissait, l’os frontal était infecté, il fallait l’enlever.
Je me suis donc retrouvée avec un os frontal en moins, et j’ai eu beaucoup de mal à cicatriser.
1 mois d’hospitalisation, 3 mois d’antibiotiques, IRM de contrôle tous les mois, c’est bien là où j’ai eu le plus peur d’y passer.
10 mois plus tard, je subis une nouvelle opération: la cranioplastie pour remplacer l’os manquant, on me pose alors une prothèse.
Je sais que j’ai eu aussi beaucoup de chance, c’était opérable, ils ont tout retiré, et surtout ce n’était pas le cancer.
Néanmoins, pour une tumeur “bénigne”, j’ai quand même eu le droit à 3 opérations, un os en moins, une prothèse et aujourd’hui je prend un traitement antiépileptique et subi ses effets sur mon organisme (fatigue, difficulté à me concentrer, oublis…)
Après tout cela, c’est le psychologique qu’il faut reconstruire, et je trouve qu’à ce niveau là je n’ai pas eu assez de soutien médical. Bien sur la famille et les amis ont été là, mais le retour à l’activité professionnelle a été un peu chaotique, et difficile à évaluer, si c’était moi, la maladie, le contexte, le retour trop vite…
Aujourd’hui 32 ans, et je me cherche encore. C’était déjà pas facile mais avec un cerveau qui se reconstruit les questions fusionnent dans ma tête. J’ai repris une activité professionnelle à peine 1 an après la dernière opération.
Je vois bien que je ne suis pas à la hauteur de mon “bac+5 et mes 31 ans…”
Les médecins me disent juste que “ça prendra le temps qu’il faut, et puis tout le monde est différent.”
Mais j’ai l’impression que je suis toute seule pour comprendre comment remettre mon cerveau sur “pied”.
Je n’ai pas eu beaucoup de soutien médical en terme de rééducation.
De moi même j’ai demandé à faire un bilan neuro-psychologique, et un EEG pour voir si c’était normal que je n’arrivais pas à me concentrer au travail. Je ne retiens rien, on doit me répéter plusieurs fois les choses pour que je comprenne. Je me sens dépassée.
Mais j’ai lu sur différents témoignages que en effet, ça peut prendre du temps. Je fais ce qu’il faut, du moins j’essaye.
Ce que je ne comprends pas c’est ce manque de communication et information entre médecin/médecin et surtout médecin/patient.
Quand j’ai commencé à prendre Androcur en 2007-2008, des études commençaient à établir le lien entre ce médicament et les tumeurs, alors pourquoi on en est là aujourd’hui 10 ans plus tard ?
Combien de médicaments sont prescrits aujourd’hui avec si peu de connaissance ou de communication sur leurs effets secondaires et conséquences lourdes à terme ?
Comment faire confiance aux médecins ?
Nos symptômes ne sont pas assez pris au sérieux, pas assez tôt. Des maux de tête ce n’est pas rien !
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