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Ménopause, endométriose…. Alerte sur le risque de méningiome du Lutényl et du Lutéran

androcur

L’Agence du médicament (ANSM) lance une consultation publique sur les conditions d’utilisation pour les femmes de ces traitements progestatifs au regard des risques de méningiome.

Les progestatifs Lutéran et Lutényl sont utilisés par une moyenne de 500 000 à 600 000 patientes françaises, selon l'ANSM.
Les progestatifs Lutéran et Lutényl sont utilisés par une moyenne de 500 000 à 600 000 patientes françaises, selon l’ANSM. (©Illustration Adobe Stock)

Diane 35, pilules de 3e et 4e génération, Androcur… Après les scandales répétés ces dernières années, les autorités sanitaires se montrent de plus en plus prudentes sur les risques associés aux pilules contraceptives et aux traitements hormonaux en général.

Au tour désormais du Lutényl (acétate de nomégestrol), du Lutéran (acétate de chlormadinone) et de leurs génériques d’être dans le viseur de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Cette dernière a publié en juin 2020 une mise en garde et des recommandations concernant ces traitements présentant un risque de développer un méningiome. 

Elle lance cette fois un appel à participer, jusqu’au 30 septembre 2020, à une consultation publique pour inciter professionnels de santé, patientes et associations à discuter ensemble de la meilleure utilisation de ces traitements.

Prescrits dans le traitement de la ménopause et l’endométriose

L’acétate de chlormadinone et l’acétate de nomégestrol, les molécules présentes respectivement dans le Lutéran et le Lytényl, sont des dérivés de la progestérone utilisés notamment dans la prise en charge de la ménopause, des troubles menstruels et de l’endométriose. L’agence du médicament estime qu’entre 500 000 et 600 000 femmes prennent l’un de ces médicaments.

Des cas de méningiome, une tumeur au cerveau le plus souvent bénigne, ont été rapportés lors de l’utilisation de ces médicaments à des doses thérapeutiques. « De plus, l’enquête sur Androcur il y a deux ans avait mis à jour un sur-risque de méningiome, il était donc logique de s’intéresser à ses cousins, deux autres macro-progestatifs », explique-t-on à l’ANSM, contactée par actu.fr.

Une étude épidémiologique plus poussée auprès de trois millions de femmes (1)  a donc été conduite et a confirmé début juin le sur-risque de méningiome associé à la prise de Lutéran, de Lutényl et de leurs génériques.

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Jusqu’à 12,5 fois plus de risques de tumeur

Comme pour la plupart des effets secondaires propres à tout médicament, le risque est plus ou moins élevé en fonction de la posologie, de la durée du traitement et de l’âge de la patiente.

Concrètement, une femme qui prend du Lutényl ou du Lutéran plus de six mois risque environ 3,3 fois plus de développer un méningiome qu’une femme qui n’en prend pas. A partir de cinq ans, le risque est multiplié par 12,5 pour le Lutényl, et par 7 à partir de 3 ans et demi sous Lutéran.

Par ailleurs le risque de méningiome conduisant à une chirurgie intracrânienne augmente fortement avec l’âge : il est par exemple 3 fois plus élevé pour les femmes de 35 à 44 ans que pour celles de 25 à 34 ans, indique l’ANSM dans une note.

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Mesurer l’équilibre bénéfice/risque

S’il n’est pas question de retirer ces médicaments du marché – notons au passage que le Lutéran n’est plus commercialisé depuis septembre, le laboratoire Sanofi ayant stoppé sa production pour une raison indépendante de cette alerte -, la consultation lancée par l’ANSM vise à réfléchir à un meilleur usage de ces traitements :

L’objectif est d’arriver à un juste niveau de prescription, un équilibre bénéfice/risque pour chaque patiente et trouver des alternatives à ces médicaments quand cela est possible et nécessaire.

En 2018, les alertes lancées sur l’Androcur avaient permis de faire largement diminuer sa prescription : de 90 000 en septembre 2018, le nombre de patientes traitées avant les communications de l’ANSM est passé à 11 000 en 2020. « Avec l’Androcur il y avait beaucoup de prescription hors autorisation de mise sur le marché [agissant contre l’hirsutisme et l’endométriose, ce traitement était souvent aussi prescrit contre l’acné ou en simple pilule contraceptive, ndlr]« , souligne l’agence sanitaire.

Avec le Lutéran et le Lutényl on est sur une exposition plus large de femmes mais on pourrait aussi arriver à stopper leur prescription comme contraceptif quand cela n’a pas lieu d’être, par exemple.

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Ne pas faire paniquer les patientes

« Il ne faudrait pas non plus faire paniquer les patientes », confie de son côté Yasmine Candau, présidente d’Endofrance. L’association nationale de lutte contre l’endométriose a dès le début été associée au suivi des travaux sur ces progestatifs pour relayer des messages de prévention auprès de ses quelques 2 300 adhérentes et 22 000 sympathisants.

Des recommandations ont déjà été faites aux médecins et aux patientes prenant ces traitements, afin de discuter de leur pertinence et de la possibilité d’y trouver une alternative, d’échanger sur le risque de méningiome ou encore de la nécessité d’une surveillance par IRM cérébrale en cas de symptômes neurologiques et/ou de prise du traitement depuis plus de 5 ans.

« La plupart de nos adhérentes ou sympathisantes nous ont confirmé que leur médecin les avait contactées à ce sujet. Cela a diminué les angoisses car un méningiome, même si c’est souvent bénin, ça fait peur », confirme Yasmine Candau, qui ajoute :

Mais certaines étaient aussi très angoissées à l’idée de devoir arrêter leur traitement. Beaucoup préfèrent le continuer en acceptant le risque car elles se sentent trop bien avec. Il faut savoir que même si des alternatives existent, il faut souvent des mois pour que le corps s’habitue à un nouveau médicament.

La table ronde avec tous ceux qui auront manifesté le souhait de participer se tiendra le 2 novembre prochain et sera diffusée en direct sur la chaîne YouTube de l’ANSM. Un bilan des échanges sera dressé dans les jours suivants.

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(1) Étude menée par le par le groupement d’intérêt scientifique (GIS) EPI-PHARE et réalisée à partir des données nationales de remboursement de l’Assurance Maladie sur 1,8 et 1,5 millions de femmes ayant consommé de l’acétate de nomégestrol ou de l’acétate de chlormadinone entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2018.

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