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ANSM CST Consultation publique sur les traitements Lutényl, Lutéran et leurs génériques et le risque de méningiome-2 novembre 2020

androcur

COMPTE RENDU

CST Consultation publique sur les traitements Lutényl, Lutéran et leurs génériques et le risque de méningiome

Lundi 2 novembre 2020 par Visioconférence

Membres du CST :

  • Sébastien Froelich, président(neurochirurgien),
  • Geneviève Plu-Bureau (gynécologue),
  • Etienne Richer (gynécologue),
  • Jacques Young(endocrinologue),
  • Henry Dufour (neurochirurgien),
  • Martine Alt-Tebacher (pharmacologue CRPV),
  • Thierry Brillac (médecin généraliste),
  • Alain Weill (épidémiologiste EPIPHARE),
  • Sabine Trébaol (Chargée des relations institutionnelles de l’association EndoFrance),
  • Marianne Niosi (Directrice exécutive de la confédération nationale du Planning familial),
  • Angèle Mbarga (Présidente de l’association Fibrome Info France),
  • Axelle Ayad (Représentante de l’association EndoMind),
  • Emmanuelle Huet-Mignaton (Présidente de l’association AMAVEA)

Le document de l’ANSM présenté en Powerpoint est ici


Autres documents concernant cette réunion : https://www.ansm.sante.fr/L-ANSM/Comites-scientifiques-specialises-temporaires/Comites-scientifiques-temporaires/Comites-scientifiques-temporaires/CST-Macroprogestatifs-et-risque-de-meningiome

Présentation de la problématique par le Directeur Général de l’ANSM, M Dominique MARTIN :

L’évaluation du risque de méningiome sous Lutéran/Lutényl fait suite à celui de de l’Androcur, afin d’arriver à un juste équilibre dans la prescription. Les travaux sur l’Androcur s’avèrent positifs, puisque l’exposition à ce médicament a été divisée par 6. La surprescription est une spécificité française

Le contexte général a été rappelé par Isabelle YOLDJIAN : les progestatifs ont des indications multiples et variées, qui doivent être revues, et la balance bénéfices/risque réévaluée pour chaque indication. Un mailing a été à nouveau envoyé aux professionnels de santé en octobre, afin des les alerter sur le risque de méningiomes avec ces deux traitements (le premier mailing date de février 2019). Il est intéressant de constater qu’à chaque communication, les prescriptions baissent. La France est le premier pays prescripteur de progestatifs.

Présentation de l’étude épidémiologique EPI-PHARE par Alain WEILL

L’épidémiologie, c’est l’estimation d’un risque. L’étude court de 2007 à 2019, avec une enquête sur plus d’1 million de femmes, avec pour objectif de mesurer le risque de méningiomes. On sait qu’un des facteurs de risque est les radiations ionisantes, la grossesse, et plus rarement la neurofibromatose de type 2. Le méningiome a une croissance lente, et ce ne sont pas les plus gros méningiomes qui peuvent poser problème, mais bien leur localisation : des petits méningiomes peuvent créer de gros problèmes. C’est une maladie rare : 8/100 000, avec la même fréquence sur toute la planète. Les prescriptions en France sont surtout celles de gynécologues.

Plus l’exposition est longue, plus le risque de méningiomes est grand. Plus la dose est élevée, plus le risque grandit aussi. A l’arrêt du traitement, au bout d’un an, le risque d’être opérée ou de subir une radiothérapie est identique à celles non traitées. Comme pour l’Androcur, il y a une relation dose-effet.

Risques de méningiomes avec Androcur 4/1000, avec Lutényl 2/1000 et avec Lutéran 1/1000.

Nombre de méningiomes opérés : 1000 cas entre 2007 et 2018. A partir de 2019, il y a un biais de notoriété à cause des alertes de l’ANSM (Note de l’association : pour nous, c’est l’inverse, il y a un biais de non-information avant 2019 ).

Alain Weill : « La personne à qui ça arrive, c’est dramatique, même si c’est rare ».

Approche chirurgicale de la prise en charge des méningiomes sous progestatifs par Sébastien FROELICH

Pour Sébastien Froelich, on ne peut parler chirurgie des méningiomes sans parler de l’arrêt de traitements. Les symptômes sont majoritairement dus à la compression du cerveau. Les méningiomes dus aux médicaments ont des particularités en nombre et en localisation. La chirurgie n’étant pas anodine, il vaut toujours mieux l’éviter. Il confirme que ce n’est pas la taille l’important, mais la localisation et les symptômes. Le méningiome peut fabriquer de l’os, et les méningiomes sphéno-orbitaire sont très fréquents quand on prend des progestatifs.

Malheureusement la littérature n’est pas très claire sur le lien hormones-méningiomes.
Les projets futurs sont nombreux : registre national, études sur l’ensemble des progestatifs, grossesse avec méningiome, évolution après l’arrêt sur des dizaines d’années. Là, on a juste 10-15 ans de recul. Urgence à diffuser l’information et à avoir des études européennes et internationales.

Auditions d’associations, professionnels de santé et sociétés savantes

Approches médicales, utilisation des progestatifs en gynécologie par Florence TREMOLLIERES (pour le CNGOF, le CNEGM, le Centre de référence national PGR, et le FNCGM) : intervention touffue, dont on peut retenir que le hors AMM ne pose pas problème et qu’il est souvent question de contraception, alors que ce ne sont pas des contraceptifs. Le Lutéran est autorisé pour l’endométriose, dont il a été souligné que c’était une pathologie chronique. Ces traitements n’ont pas d’indication pour les fibromes, et l’association Fibrome Info France a confirmé que ces traitements étaient peu efficaces pour cette indication. Etienne RICHER a indiqué que les traitements médicamenteux pouvaient être remplacés par de ligatures de trompe, par exemple, ou qu’il était nécessaire de faire plus de chirurgie pour l’endométriose.  De même l’hystérectomie est beaucoup moins pratiquée en France qu’aux USA par exemple.

Audition Yann MAZENS / Jean Pierre THIERRY pour France Assos Santé

Il a été insisté sur le problème du mésusage important de ces traitements, et la sur-prescription hors AMM qui favorise la banalisation, ce qui est un particularisme français.  Les professionnels manquent d’informations, et les lettres aux professionnels ne sont pas suffisantes.

Parler de tumeurs bénignes nuit à la communication sur les conséquences parfois dramatiques des méningiomes.

Les patientes vont chercher des informations dans les médias, or ces informations ne sont pas toujours fiables.

Le rappel des patientes au-delà du délai de 24 mois est tout à fait possible avec l’aide de la SNIIRAM.

Auditions de 8 patientes

Problématiques pointées :

  • Baisse de libido
  • Non prise en compte de la demande particulière de la femme, le médecin ne donne souvent pas le choix.
  • Problème du suivi des femmes sur le long terme
  • Non prise en compte de la fatigue quand les méningiomes sont là et banalisation des symptômes.
  • Prise de poids
  • Symptômes dépressifs
  • Pas d’informations sur le risque de méningiomes
  • Signer une ordonnance est un acte grave

Isabelle YOLDJIABN conclut en disant que

  • Des courriers sont prévus avec la CNAM pour informer du risque sur le Lutéran et Lutényl, mais qu’au vu de la situation épidémique actuelle, ils ne pourront être envoyés rapidement. En attendant, un relais se fera sur le site ameli. fr
  • La prochaine réunion du 16 décembre déterminera les informations à envoyer aux professionnels de santé et aux patientes, la révision de la balance bénéfice/risque pour chaque indication (et quelles indications sont à garder), et il sera complété les mesures de suivi par imagerie.

Il faudra être vigilant sur les niveaux de preuve donnés par les gynécologues pour chaque indication. On ne pourra pas décider sur des opinions, ni sur un consensus. A savoir si les études sont là, et les niveaux de preuve suffisants, même si Geneviève PLU-BUREAU souligne qu’on n’aura jamais d‘études randomisées et qu’il faut absolument garder ces progestatifs !

Thierry BRILLAC a parlé du dialogue primordial entre médecins et patientes, dialogue souligné par un document de la HAS de 2013 : « Patients et professionnels de santé, décider ensemble ». Au vu des témoignages recueillis, on voit qu’on en est loin dans beaucoup de cas !

Rappel : Isabelle Yoldjian, dans la réunion préparatoire que nous avons eue le 27 octobre, associations et ANSM, nous a bien indiqué que la « progestérone naturelle », ça n’existe pas ! De façon générale d’ailleurs, les hormones naturelles, ça n’existe pas. Un cachet, ce n’est pas naturel, c’est chimique et c’est un médicament.

La vidéo sera consultable sur Youtube, elle dure plus de 4h.

La deuxième partie de la réunion du CST pour décider du devenir du Lutéran et Lutényl aura lieu le 16 décembre.

Communication de l’ANSM ici

Emmanuelle HUET-MIGNATON

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